Première journée – 24 juillet 2022
Stèle Alice Arteil.
Allocution de l’ANACR :
Mesdames, Messieurs, chers Amis de la Résistance ;
«Si l’Histoire n’a retenu que les exploits du chasseur, c’est parce que le lion n’a pas d’historiens», écrit Jean-Yves Le Naour. À côté des grandes figures de proue, des êtres ordinaires ont eux aussi «fait» l’Histoire
Parmi eux, Alice Arteil a toute sa place. La guerre, l’invasion de notre territoire, l’occupation, les privations et la répression de la part de l’occupant et de ses complices de l’Etat français ont allumé en elle un esprit de révolte indomptable. Alice Arteil est entrée de plein pied dans la lutte, surmontant la peur, l’incertitude du lendemain, le poids de l’ordre social réservant aux femmes un rôle subalterne, surtout dans le domaine du combat, et même la séparation douloureuse avec sa petite Marinette, née le 4 janvier 1940, qu’elle ne verra qu’épisodiquement une fois entrée dans la clandestinité des combattants de l’ombre.
Alice Arteil a sublimé son destin, elle a incarné le courage, l’esprit de résistance, la ténacité. Comment aurait-on pu imaginer qu’Alice Poyet, née en 1912 à Saint-Romain-d’Urfé, devenue Madame Arteil en 1936, commerçante en tissus à Saint-Just-en-Chevalet, allait se muer en chef d’un groupe de maquisards, vivant dans les conditions extrêmes de la clandestinité à travers les Bois Noirs et les Monts du Forez, pourchassée par la Gestapo et les sbires de Pétain et Darnand, participant à des actions les plus téméraires, puis en lieutenant dans un régiment d’infanterie prenant part aux violents combats de la Libération ?
D’abord seule, ou presque, elle se lance dès 1941, dans la distribution de tracts et journaux clandestins, après avoir appris que Raymond, son mari, est détenu dans un stalag en Allemagne.
En 1942, elle intègre les Francs-Tireurs avec pour mission de protéger et recueillir les chefs militaires recherchés par la Milice et la Gestapo, ainsi que recevoir et mettre en lieu sûr les parachutages.
En septembre 1943, elle se retrouve à la tête du maquis de Lavoine fort d’une cinquantaine d’hommes. Une action d’envergure, menée par les GMR, la Milice et la Gestapo disloque ce maquis le 15 novembre.
. Durant cet Hiver 1943, Alice parcourt infatigablement la Loire et l’Allier tant pour échapper à la Gestapo que pour nouer des contacts avec l’organisation du Maquis : les MUR (mouvements unis de la Résistance) De là naquit, le 1 er Janvier 1944, le groupe Franc ‘’Alice’’ qui travailla sous les ordres du Colonel Colliou, alias Roussel, appartenant à l’ORA (Organisation de Résistance de l’Armée). En janvier 1944 Alice ARTEIL dispose de 7 volontaires: Jean Carrier, Louis Pers, Louis Groslier, Louis Brandon qui deviendra colonel, Jean Marie Carrier puis René Erhard et Joannès Bardet. Joseph Ronckar et Joseph Besch les rejoignent plus tard.
Ce petit groupe plus mobile et plus discret qu’un important maquis organise de nombreuses opérations de sabotage dont les plus remarquables sont le déraillement d’un train blindé à Paray-le-Monial, la destruction d’une voie ferrée entre Roanne et Lapalisse, la destruction de câbles téléphoniques et l’attaque d’une cinquantaine de soldats allemands près de Decize.
Après le débarquement en Normandie des troupes Alliées, le territoire français est progressivement libéré. Alice participe avec sa section à la libération des boucles du Doubs, puis à celles de Valentigney et de Montbéliard.
Les troupes formées par les maquis et l’armée régulière fusionnent en septembre 1944, c’est « l’amalgame ». Alice se retrouve incorporée avec ses hommes au sein du prestigieux 152ème Régiment d’Infanterie, les Diables Rouges, avec lequel elle franchit le Rhin en avril 1945. C’est à Singen, près du Lac de Constance qu’elle est démobilisée.
De retour à St-Just-en -Chevalet, elle retrouve son mari qui vient d’être libéré par les troupes russes, et sa petite Marinette, âgée de cinq ans, qu’elle aura peu vu grandir.
Pour eux, la guerre aura été une période de séparation douloureuse, mais pour Alice, ce fut une occasion de se transcender pour un juste combat, qui lui valut de nombreuses décorations :
-Légion d’Honneur
-Croix du Combattant Volontaire de la Résistance
-Croix de Guerre avec Palmes
-Croix du Combattant Volontaire 1939-1945
-Croix d’Honneur franco-britannique
-Médaille de la Résistance du Luxembourg
-Croix du Commandeur de l’étoile de la Résistance franco-belge.
Cette stèle inaugurée le 24 juin 2001, rappelle à tous le courage de ces Résistants guidés par une femme d’exception, et si « l’impôt du sang n’a pas suffi à fonder l’égalité hommes femmes », malgré le droit de vote enfin acquis en 1944, du moins peut-on espérer que les historiens d’aujourd’hui auront à cœur de rendre un nom, un visage, à celles qui se sont engagées au péril de leur vie pour défendre la liberté et la démocratie dont nous bénéficions aujourd’hui.
Le dernier compagnon d’Alice Arteil, Louis Groslier, s’est éteint il y a un an, il nous revient à nous aussi de tout mettre en œuvre pour que leur combat, leurs sacrifices, restent gravés dans nos mémoires, et surtout que leur exemple nous enjoigne à ne pas fermer les yeux face à toutes les atteintes à la liberté et à la dignité humaine dont malheureusement l’actualité fourmille.
Ne soyons pas ceux qui marchent à côté en acceptant des petites compromissions laissant grandir des idéologies que la Résistance a justement combattues.
Stèles de Goutaudier et Fayot.
Situées sur la D477 entre Trappière et Saint-Nicolas-des-Biefs.
Le 17 décembre 1943, les hameaux « Goutaudier » et « Fayot » sont investis. Francisque et André Talvat, Alphonse et Emile Saint-Gérand, Gabriel Sennepin, Jean Drigeard et Robert Boslige sont arrêtés et déportés. Seul Francisque Talvat reviendra.
La ferme Dépalle
Située entre le Gué de la Chaux et « La Grande Ecluse », sur la commune de Saint-Nicolas-des-Biefs.
Le 22 juillet 1944, des maquisards séjournant à la ferme Dépalle sont attaqués par des Allemands et la ferme est incendiée. On compte cinq victimes parmi les combattants de la Résistance ; le fermier Jean-Claude Dépalle et son fils Robert sont déportés. Ils ne reviendront pas.
Le Gué de la Chaux.
Située sur la D51 entre Saint-Priest-Laprugne et la Croix-Trévingt.
Plusieurs camps de maquisards étaient installés dans le secteur dit de « la Madeleine », du nom d’une chapelle proche du Gué de la Chaux en juillet 1944. Après la capture d’un jeune Résistant dans le bourg de Saint-Nicolas-des-Biefs quelques jours avant, le site fut encerclé par les SS venus du Mayet de Montagne, renforcés par des GMR.
Cinq maquisards furent tués, dont un jeune de 16 ans.
La mémoire de ces combats est honorée chaque année à une date proche du 22 juillet, conjointement par les associations de l’Allier , l’ANACR en particulier, et les camarades du Comité commémoratif du Roannais, en présence de nombreux élus.