Robert FALLUT (Résistant déporté) s’entretient avec Georges GAVELLE (responsable militaire du maquis HOCHE)
Actif dès 1940 dans la clandestinité après son interdiction, le parti communiste, la jeunesse communiste et le Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France de la région de Montluçon ont repris leur activité de propagande malgré les arrestations de janvier 1942. Georges MARRANE, responsable national du Front National vient, en avril-mai, à Montluçon pour rencontrer Louis Auguste BAVAY et Jean MATHE, les responsables de ces organisations.
Il leur demande de faire ce que font leurs camarades de la zone occupée, c’est-à-dire ajouter à la propagande la lutte armée. Louis BAVAY prend la responsabilité de l’organiser. Il va créer la première formation F.T.P.F. de l’Allier qui est appelée « Groupe armé de Montluçon-Ville ».
Les animateurs de ce groupe sont : Louis BAVAY, dit Tilou, Marcel ZWILLING et Pierre KATZ.
Robert FALLUT. :
Comment as-tu rejoint la résistance ?
Georges GAVELLE. :
Je suis né en 1922, dans une famille qui a toujours lutté pour une amélioration de la condition ouvrière, tant dans le milieu politique que syndical.
J’ai grandi dans cette rue de Chambon qui était un modèle de la résistance populaire à Montluçon, on y recense une trentaine de communistes et une dizaine de socialistes.
Toutes les conditions étaient réunies pour que j’entre à la J.C., puis dans la Résistance, c’est la voie que j’ai choisie.
R. F. :
Qu’as-tu fait après la sortie de l’école primaire ?
G. G. :
J’ai continué, ainsi que mon frère, à l’école professionnelle jusqu’au CAP-Brevet. Je suis entré à l’usine « Saint Jacques », par réquisition, pour être employé au service de l’entretien. Ce service me mettait en contact avec les ouvriers des différents services, et me permettait des déplacements incontrôlés.
R. F. :
Il semble, d’après ce que tu me dis, que les ouvriers étaient étroitement surveillés par la direction de l’usine, ce qui devait gêner le développement de la Résistance ?
G. G
A l’usine Saint Jacques, Roger VARRIERAS y avait le syndicat ouvrier C.G.T.U. a une forte implanté. Mon emploi à l’entretien me permettait d’assurer la liaison entre les employés et les ouvriers des différents services. Très souvent, je transportais des paquets et plis qui devaient être constitué de tracts bien sûr et de journaux. J’étais animé par Marcel GUETONY un de grande connaissance familiale, ainsi que BERBICHIER et DESGRANGES qui m’aidèrent avec une fraternité remarquable à faire mes premiers pas clandestins que je considérais à l’époque un peu comme de la broutille et qui furent décisives pour ma vie entière tant les enseignements tirés de la fidélité à la cause des travailleurs, me fut une obligation en toute circonstance et surtout en vie professionnelle, si drôle que cela puisse paraître.
R. F. :
Comment es-tu entré dans l’armée d’Armistice ?
G. G. :
En février 1941, recensement des jeunes nés en1922.
S’offre à moi : partir aux chantiers de jeunesse d’où revient mon frère (qui fut soumis à une propagande pétainiste effrénée) ou partir travailler en Allemagne, ce que nous refusions tous les deux.
Suivre les conseils des dirigeants de la J.C. : Léo FIGUIERE, Maurice BERLEMONT, René ROUCAUTE, pour m’engager dans l’armée d’Armistice. (Une appréciation bien différente de la fuite par rapport au savoir de l’utilisation des armes). En ce qui me concerne, partir de l’état de F.T.P. de base et achever au grade de colonel donne une réponse positive à la solution que j’ai prise. Sans pour autant avoir une attirance particulière mais la J.C. y trouvait une solution partielle à la Résistance, ce fut vrai en tout cas pour un certain nombre.
R.F. :
Cette solution a-t-elle été approuvée par tes camarades ?
G. G. :
Pas par tous, mon engagement dans l’armée donna lieu à beaucoup de discutions et même à l’opposition de certains. Mais la vie a montré que la direction de la J.C. a eu raison de me conseiller de rentrer dans l’Armée. Certains de ceux qui ont reçu une formation militaire de base ont formé les cadres des F.T.P. Il reste de fameux exemples : Les brigadistes de la guerre d’Espagne, ROL, SIRCA (qui a été responsable en Allier), m’a montré et enseigné de la meilleure manière le combat de guérilla et la pratique de la responsabilité militaire.
Nous nous sommes rencontrés à Lalizolle pour envisager un déplacement vers la forêt de Tronçais dans un premier temps, mais nous n’en avons pas eu le temps : la capture de notre camp, près de Bouénat, le 25 septembre, le cœur de notre dispositif ne l’a pas permis.
R. F. :
A ton départ, qu’est devenue la ronéo récupérée?
G. G. :
La ronéo provenait des deux prises le 13 février 1941 par les F.T.P. ????, est alors prise en charge par Marcel ZWILLING, puis par les frères BOURNAUD. Après l’entrée des Allemands dans la zone non occupée, je suis démobilisé. Je reprends la ronéo pour quelques temps, puis la repasse aux frères BOURNAUD lorsque Tilou BAVAY me confie la direction militaire du groupe armé de Montluçon-Ville (dirigé à l’époque avec deux autres : KATZ et ZWILLING).
R.F. :
Comment s’est développé ce groupe ?
G. G. :
Ce groupe est rejoint, volontairement et sur recommandation, par un certain pourcentage de francs-tireurs du P.C-F.N. de l’Allier et du Cher de la zone sud.
L’armement du groupe se limite à 2 revolvers à Montluçon ; nous sommes donc relativement peu efficaces ce qui nous contraint à des expédients de toutes sortes : pavés comme projectiles, explosifs fabriqués avec les moyens du bord et qui n’explosent pas.
Cela n’a pas empêché de participer à de multiples actions, dites non conventionnelles, telles l’attaque du bureau de placement allemand et de la maison du Maréchal et lorsque Hoche, pour une part capturé, nous devions harceler le poste de DCA allemand des Guinebert.
Pour sa sécurité, une partie de ce groupe quitte Montluçon. Ces clandestins sont hébergés dans des familles communistes de Marmignoles, (quartier de Désertines) avec, comme position de repli, la famille SALVERT, à Villefranche d’Allier. En somme, le pré maquis a été constitué en ce lieu avec l’aide surtout de la famille GUETONY.
R. F. :
Le 11 novembre 1942, l’armée allemande entre dans la zone non occupée
G. G. :
L’armée allemande entre à Montluçon s’installe à la caserne Richemont, en lieu et place du 152ème Régiment d’infanterie, appelé le 15/2 dont nous aurons l’occasion de reparler, tant il y a de faux. Le drapeau du régiment est caché au dos des armoires du bureau de la S.N.C.F., place de l’Hôtel de Ville, sous la responsabilité de Monsieur TABOULOT, chef de ce bureau. Il sera remis, à la libération, au lieutenant-colonel COLLIOU, qui commande ce régiment. Il n’a jamais daigné en accuser réception et remercier les cheminots gardiens. COLLIOU, personnage étrange, qui n’a pas été le seul, au rôle épurateur des F.T.P., comme il le fit, avec l’aide du lieutenant « Michel » à la reconstitution du régiment.
Mais l’installation des Allemands en zone sud, -en nous mettant au même sort que la zone nord- a littéralement affermi les résolutions individuelles et fouetté notre résistance, la préparation et l’exécution du 6 janvier 1943 en est la preuve.
R. F. :
Comment l’entrée des Allemands fut-il ressenti par le groupe Montluçon Ville ?
G. G. :
Ce même jour, le groupe doit faire un galop d’essai en vue des actions futures. Il doit assister et protéger la manifestation prévue au monument aux morts de Montluçon, mais la présence des soldats allemands à Montluçon bouleverse le programme. Quelques camarades s’y sont rendus. Cet abandon du programme montre le manque de maîtrise fait d’hésitations de la part du groupe de francs tireurs. Il est évident que ne s’entreprend pas si facilement l’acte armé lorsqu’on est pacifiste et inexpérimenté.
R. F. :
Pourquoi, à cette époque, envisager la création d’un maquis ?
G. G. :
Au mois de décembre 1942, le groupe Montluçon-Ville, qui s’est installé à Désertines, est devenu trop important. Il est décidé de le remplacer par un camp qui s’installera en campagne. A cette époque le terme maquis était peu employé : le camp Hoche, le camp « Woldi ». Comme, je possède une formation militaire de base, je suis chargé de sa réalisation. C’était très lourd de responsabilités et je doutais beaucoup de ma capacité mais l’accentuation de la « déportation » des travailleurs en Allemagne nous fit penser à les recueillir par rapport au 6 janvier, en gare de Montluçon. Les choses envisagées ne se passent pas forcément comme il est envisagé et si nombreux furent les « déserteurs » du S.T.O., il y en eut bien d’autres sur la base de leur patriotisme.
Ainsi, un camp installé à la campagne nous permettait de prendre en charge ceux qui refusaient le S.T.O. et aussi et surtout pour passer à une lutte armée inexpérimentée.
R. F. :
Par qui as-tu été appelé à ces responsabilités ?
G. G. :
Il existait un Etat Major de zone sud,
Un Etat Major interrégional,
Un Etat Major régional qui est en cours de préparation et n'est pas installé. Au triangle de direction militaire, il n'y a que le commissaire à l'organisation, LAURENT, dit Edmond, qui soit nommé. Mais un grand rôle est tenu par le parti communiste, ses jeunesses et le F.N. qui me désignèrent. C'est par la personne de Tilou BAVAY que ma mise en place fut faite, sur instruction, BAVAY, Auguste BAVAY et la direction du groupe armé.
R. F. :
Quels étaient les principaux sujets de conversation ?
G. G. :
Nous discutions de tout : de l’opérationnel et de la politique, comme il se doit, et que font les militaires actuels tout en affirmant qu’ils ne s’occupent pas de politique. (Mon œil ! car ils savent que c’est la politique qui conditionne l’action militaire, sinon l’action militaire ne peut naître et exister par le seul fait (à part le fascisme). L’enseignement militaire est démonstratif à ce sujet. Une bonne connaissance et expérience politique ne pouvaient que faire des militaires d’une certaine compétence en nos rangs ; elles étaient indispensables.
R. F. :
Quel fut le résultat de la présence allemande à Montluçon et comment va évoluer le groupe Montluçon-Ville ?
G. G. :
Décupler le besoin d’agir : les « décideurs » politiques décident :
- création d’un Etat-major militaire,
- création d’une formation maquisarde.
Au mois de décembre 1942 le groupe est devenu trop important. Il est décidé de le remplacer par un camp qui s’installera en campagne. Je débute l’organisation de ce pré maquis à Marmignole avec mes traditionnels camarades de l’usine Saint-Jacques: Marcel GUETONY et BERBICHIER, DESGRANGES. Rien n’est simple il faut trouver un emplacement et les moyens de commandement et d’action (ce qui a constitué un des éléments[1] des enseignements tirés à l’issue du 6 janvier 1943 car on ne peut oublier qu’une compagnie allemande fut dépêchée aux cotés des forces policières françaises. l’occupation allemande fouettait les résolutions individuelles et les analyses de situations. Pour l’essentiel, le groupe armé de ville a constitué les éléments premiers de pré maquis et maquis mais il fut laissé un groupe d’action (équipe spéciale) constitué de francs tireurs de qualité recevant des missions délicates ; un membre demeure à Verneuil encore actuellement.
R. F. :
Sa réalisation n’a pas dû être de tout repos ?
G. G. :
En effet, nous avions tout à apprendre : Combien d’échecs ont marqué la vie de ce premier maquis de l’Allier ? J’ai la liste, certes incomplète, des actions prises en compte par la Commission d’homologation de la Résistance de l’Allier, constituée de résistants F.F.I. (C.F.L. des M.U.R. et A.S. très majoritaires). Comme fait de résistance, elle n’a pas voulu imputer à l’actif de Hoche les pavés dans les vitrines des locaux au Maréchal et de l’office allemand parce qu’un pavé ne peut être considéré comme résultant d’une arme, ce qui montre le degré de méconnaissance des moyens de la Résistance populaire ; pas plus que la destruction des gerbiers et de l’ensemble de l’appareil de battage chez les collabos actifs ne fut pas prise en compte et cependant c’était une atteinte à l’économie de l’ennemi et au moral des collabos car les instructions reçues – ce qui fut notre fait était, en premier ennemi, de viser le maréchalisme (Vichy) avec une part importante d’activités « explicatives » (tracts et journaux). C’est ce qui se fit comme l’effort constant organisationnel pour nous-mêmes et en aidant les légaux à se servir des armes notamment, se garder et donc se surveiller et agir…
En bref, ce fut certes difficile mais combien stimulant même s’il fallut déplorer outre les loupés de combat de rares défections (pas de désertion) mais des oublis de rejoindre après avoir fait part de sa venue….
R. F. :
Peu de temps après ta prise de fonction est survenu un événement capital qui a, me semble-t-il, tout bouleversé ?
G. G. :
En effet, le 6 janvier, la population de Montluçon s’est opposée au départ d’ouvriers pour l’Allemagne. Cet apport de combattants au groupe Montluçon-Ville oblige l’Etat Major en formation de la R2 à hâter leur départ à la campagne. D’après les archives de l’armée, en mars 1943 fut créé le maquis Hoche dont l’effectif total est, à ce moment, de 31 francs-tireurs contrôlés par l’appareil militaire. Cela n’exclut pas l’existence de groupes de quartiers, d’usines et de chantiers qui se sont révélés avoir opéré, bien avant cette date, sans contrôle officiel. Le recrutement parmi les réfractaires du S.T.O. offre un vaste champ d’action de la résistance des autres et de nous.
R. F. :
Comment fut choisi le camp ?
G. G. :
La recherche d’un lieu pour y installer un maquis, en fait dès fin 1942, ne fut pas chose facile. La région est vallonnée, les taillis et les forêts sont les seuls endroits où un maquis peut le mieux se dissimuler mais ils ont, la plupart, des bûcherons.
Un maquis, pour survivre, doit bénéficier d’un environnement favorable et de sécurité, c’est-à-dire une population à dominante, si possible, acquise à la Résistance (mais des francs tireurs pouvaient donner peur), susceptible de le ravitailler, de le renseigner. Pour cela, une infrastructure de F.T.P. légaux ou de sympathisants est nécessaire. A l’époque, il faut compter au moins 2 légaux pour un maquisard.
Ces légaux continuent d’exercer leur métier, ils connaissent la région et sont toujours disponibles pour le renseignement, le guidage, le ravitaillement négocié du maquis, l’aide diverse aux maquisards sans pour autant savoir où ils sont souvent.
Deux régions, pas trop éloignées de Montluçon, semblent pouvoir fournir les légaux nécessaires : le triangle formé par les communes Treban, Meillard, Besson, Cressanges et celui, plus éloigné, formé par les communes d’Ygrande, Saint-Plaisir, Theneuille. Ce sont des villages où, dans chaque maison, les résistants peuvent trouver, à une ou deux exceptions bien connues, aide et assistance comme, dans son livre « Résistance Rouge et Milice Noire » Roland PASSEVANT les a appelés « les triangles de fer ».
Grâce à un environnement favorable à la Résistance, la commune de Meillard est choisie. Cette commune va abriter, en 1943, le camp Hoche, et en 1944, le camp Danielle CASANOVA. [2]
Meillard est préféré à Saint-Plaisir pour abriter le camp. Sa localisation, au plus près de Vichy, capitale de la collaboration, se veut un symbole de la détermination de la Résistance dans la lutte contre le nazisme et ses complices. Démontrer aussi que se battre les armes à la main près du siége du gouvernement de traîtres était possible. C’était nécessaire de payer d’exemple pour les combats à venir qui ne pouvaient qu’aller en s’emplifiant..
Meillard dans la Résistance
R. F. :
Comment s’est créé l’environnement qui devait entourer le maquis ?
G. G. :
C’est d’abord à la suite d’une rencontre entre Gaston PLISSONNIER et Francis MITTON de Bresnay, pendant l’hiver 1941-1942, que s’est développé dans la région le Front National. Francis MITTON et Emile PARNIERE d’Ygrande, ont créé, dans l’Allier non occupée, la C.G.P.T. (Confédération Générale des Paysans Travailleurs). C’est parmi les membres de ce syndicat illégal que vont se recruter des F.T.P. sédentaires ou légaux qui vont aider, le moment venu, le camp à s’installer et se structurer.
Edmond PETIT, qui a remplacé Armand BERTHOMIER, après son arrestation, à la tête du Parti Communiste clandestin, charge Edmond CIVADE, son adjoint, de contacter Lucien DEPRESLES pour qu’il guide vers le lieu-dit « La Pièce Plate » les responsables qui recherchent un emplacement pour le camp C’est un taillis situé à la limite des communes de Meillard, Verneuil, Lafeline, on y accède, aujourd’hui, à travers prés, à partir du hameau des Champs. Ce taillis présente l’avantage d’avoir plusieurs issues de sorties.
Le responsable régional des F.T.P. Tilou BAVAY, pseudo « le grand Robert », se présente, un soir à Lucien dont il partage le repas puis va dormir dans la fameuse chambre du grenier, chambre réservée aux responsables de passage. Vers 5 heures et demie du matin, Lucien avale sa tasse d’ersatz de café, puis réveille BAVAY. Ils descendent, à travers prés, visiter l’emplacement proposé. Tilou qui a toujours défendu l’idée de l’implantation d’un maquis près de Vichy, capitale de l’Etat français, y fixe l’emplacement du futur camp F.T.P.
R. F. :
Une fois choisi l’emplacement du camp, il a fallu l’installer. Comment cela s’est-il fait ?
G. G. :
L’installation du camp pose de nombreux problèmes, que ne peut prendre ou résoudre à cette époque, l’appareil de direction régional des F.T.P. qui vient de se créer dans l’Allier, ce fut mon lot et l’on devine les démarches multiples qui ont du être effectuées pour disposer d’un minimum de matériel de campement, de ???? à construire, etc. parmi les premiers venus, outre le déplacement des combattants de Désertines, HUGUET, dit « Le Feu » (connu à Montluçon, puis à Moulins pour la diffusion du journal ayant beaucoup aidé les résistants).
R. F. :
En fait, la création du maquis Hoche a précédé celle de l’Etat Major régional F.T.P. ?
G. G. :
Effectivement, ce sont les communistes de la région de Montluçon qui ont pris la lourde responsabilité de la création de ce camp. Dans un premier temps, il fut appelé camp de « Saint-Pourçain », nom abandonné, par nécessité de sécurité. La création de celui des C.F.L.-M.U.R. Leur réalisation prêtait à confusion. Il était nécessaire de taire la localisation du lieu de vie d’une telle formation, formation qui fut le premier maquis de l’Allier F.T.P. découlant des éléments francs tireurs de 1942 à Montluçon. Car les initiateurs avaient la volonté de démontrer qu’il était possible de mener la lutte armée, surtout à proximité de la capitale de l’Etat Français (raison pour laquelle a été minimisée la capture de ce maquis comme si n’existait qu’un simple fait banal par les tribunaux vichystes).
R. F. :
Après la décision d’installer le camp à Meillard, les communistes ont dû faire face à de nombreux problèmes ?
G. G. :
En effet, une fois choisi le lieu de ce premier camp, il faut penser à son installation rapide et au déplacement du groupe de Marmignoles.
L’installation, qui avait été envisagée pour début mars, ne put être réalisée qu’au mois de mai car il fallut résoudre de multiples problèmes et les discussions furent nombreuses avec des arguments des contre et des pour, une fois le sort fixé, il fallait agir.
R. F. :
En tant que responsable, tu as dû rencontrer et résoudre de nombreux problèmes ?
G. G :
C’est au fur et à mesure des venues constituant toute une équipe que les problèmes de l’installation furent résolus car seul, on ne pèse pas lourd. En effet, il falut donner à ces combattants volontaires un minimum de moyens leur permettant de faire face à des conditions de vie qu’ils ne connaissent pas.
- trouver des fournisseurs pour les vivres, certes et
- trouver des moyens financiers, (quelle pauvreté quand j’y songe !)
- acquérir des ustensiles de cuisine collectifs,
- trouver les moyens de déplacement (récupérer des vélos), ce qui fut une opération,
- trouver la solution au problème de l’habillement, pour demeurer convenable,
- rechercher des armes et des explosifs, (les complications furent grandes)
- prendre contacts avec les F.T.P. légaux pour le renseignement, les aider et nous faire aider
- établir avec eux le calendrier des visites opérationnelles, surtout pour apprendre l’utilisation des armes.
R. F. :
Comment furent résolus tous ces problèmes ?
G. G. :
Pour la construction des cabanes, je suis mis à contribution, comme tous les autres (un militaire encore non stratège et tacticien sait faire cela). Pendant le temps de la construction, je suis hébergé dans la famille DEPRESLES aux Champs (la fameuse chambre des passagers au grenier).
Le problème du ravitaillement est résolu avec la participation des paysans [d’évidence ce que la Résistance –surtout armée- doit aux paysans, c’est simple : sans eux ils n’auraient pas existé. Contrairement au fameux article du journal « le Monde » selon lequel « ils n’avaient que très peu fait de résistance » (au Monde sans doute puisqu’il n’existait pas mais en Auvergne et Bourbonnais…) Cher Allier] du coin, des boulangers, avec mention spéciale pour CABANNE, boulanger à Buxières-les-Mines et les mineurs de Saint-Hilaire Buxières-les-Mines qui collectent des vivres et les transportent dans une remorque de vélo en un lieu désigné situé hors du camp. Ces mineurs qui avaient été les initiateurs de la Résistance dans l’Allier n’avaient pas baissé les bras face à la répression.
L’argent est remis avec une certaine régularité. Il provient de l’organisation militaire du P.C., des communistes organisés de la région de Bellenaves, Commentry, Gannat, des collectes faites auprès des malades du sanatorium François. MERCIER par un médecin communiste. L’argent était remis à Armand CIVADE, puis à Lucien DEPRESLES qui le confiait au chef de maquis. Il m’est parvenu aussi le produit de quêtes faites par des prisonniers détenus en Allemagne et par les ouvriers des usines de Montluçon, notamment des usines Saint Jacques et de la Côte Rouge. (venant d’Allemagne de la part de Jean Baptiste BIDET).
Les ustensiles de cuisine ont été recueillis auprès des sympathisants, fabriqués ou achetés dans le commerce, principalement à Cosne d’Allier et au Montet. Mais les ouvriers des usines Saint Jacques, Dunlop et la Cote Rouge, nous ont pourvus en divers matériels.
Les déplacements se faisaient avec des vélos de récupération.
Le tailleur de Saint-Pourçain-sur-Sioule, CAMPRON, veille à l’entretien des vêtements. Arrêté, il sera déporté et en mourra.
Veiller à ne pas se faire repérer en se déplaçant, avec ou sans arme, dans des régions inconnues, à se servir de faux papiers d’identité en se créant de faux parents, de faux lieux de naissance, de travail, etc.
Le problème des armes trouve une solution différente de celle envisagée : prendre possession des armes récupérées à la débâcle au lieu de les prendre à l’ennemi. Il y en avait notablement de récupérées, entreposées et entretenues chez madame BIDET, à Treban.
Pour les sabotages, il faut rechercher des explosifs, les mineurs sont alors mis à contribution, naturellement ceux de Noyant, Saint-Hilaire et Buxières-les-Mines et même des carrières de Montluçon.
Il faut que les combattants, qui ignorent tout des armes, apprennent à les entretenir, à s’en servir, à prendre grand soin des munitions très rares, je détiens encore le sac qui avait servi au transport des premiers explosifs et munitions en 1943. La grande majorité des maquisards sont des jeunes qui n’ont aucune formation militaire. Ils doivent apprendre à se servir des explosifs. Combien de sabotages manqués par manque de connaissance pour les confectionner artisanalement : tout s’apprend et tout ne fonctionne pas bien ou convenablement, hélas !
Il y a tout à apprendre !
R. F. :
Comment fut dénommé le Camp Hoche ?
G. G. :
Dans un premier temps, le camp est appelé camp de Saint-Pourçain. Pour des raisons de sécurité, il est recommandé, sauf après le 6 juin 1944, de ne pas donner à un camp le nom du lieu où il est situé. SIRCA, ancien combattant de la guerre d’Espagne, inter régional militaire a dit, en proposant le nom de Hoche : « en donnant au maquis le nom d’un militaire de la révolution française, cela obligera les répressifs à faire de l’histoire s’il nous arrive malheur. » [3]
R. F. :
Comment s’est fait l’installation du camp ?
G. G. :
Tous ceux du groupe de Désertines se sont retrouvés au camp à Meillard, à l’exception de ZWILLING, KATZ et d’une équipe spéciale appelés à d’autres responsabilités. Je suis le responsable de ce camp avec pour adjoint, Roger ESTORGUE, maquisard venu du Cher non occupé, fuyant le S.T.O., qui a suivi une formation militaire poussée et avec un coté pratique excellent. Notre hiérarchie est : Tilou BAVAY, et le triangle régional qui se met en place conduit par « Edmond » puis FOMBONNE « Loulou », puis SIRCA dit « Berger ».
R. F. :
Comment était organisé le service de santé, dans ces dures conditions de vie, il devait y avoir des malades ?
G. G. :
Il y eut peu de malades mais des blessés et des handicapés. C’est le docteur LHEURY, du Theil, qui assure les soins. C’est lui qui m’a soigné avec HUGUET lorsque nous fûmes blessés en opération. L’hébergement des malades et des blessés est assuré par les familles DEPRESLES, CHALMIN, LACARIN, MITTON, BLANCHARD et BOUCHARD, entre autres. Nous avions, à l’arrière, le docteur Michel ROUSSEAU, de Montluçon, qui nous a soigné des malades de la gale et autres saloperies du même genre. Ce fut un gros et grand problème.
R. F. :
Comment vous êtes-vous procurés les armes ?
G. G. :
Après notre installation à Meillard, nous prenons en charge celles qui avaient été récupérées après la débâcle. Celles que Fernand THEVENET et les DEPRESLES avait ramassées à la débâcle du pays. Après sa démobilisation de l’armée, Fernand s’était caché chez lui, puis chez Madame BIDET, (dont le mari est prisonnier en Allemagne), puis chez. les frères THEVENET. C’est dans un vieux chêne, un « têtard » creux comme il en existe à cette époque et l’appelle le monde paysan. Elles furent, en plusieurs temps, rapprochées du camp.
R. F. :
Quelles furent vos activités ?
G. G. :
L’historique, remis à l’autorité militaire (signé par Tilou BAVAY), donne des indications précises. Nous devions avoir réalisé de l’ordre d’une cinquantaine d’opérations en 4 mois, bien plus que les autres organisations réunies (raisons sans doute pour lesquelles on ne parle pas de Hoche) !
Les actions du maquis Hoche revêtirent la forme de guérilla et de sabotages : Sabotages de lignes électriques, de transformateurs, de voies ferrées, destruction de dépôts allemands, engagement contre la milice et indirectement l’armée d’occupation, avec des difficultés de toutes sortes. La guérilla se pratique pour bien s’apprendre. ZWILLING et KATZ balançaient régulièrement des tracts par-dessus les murs de la caserne en déjouant les patrouilles allemandes (écrits allemand qu’ils pratiquaient).
R. F. :
Le maquis s’est-il développé après son installation ?
G. G. :
Avec le refus des jeunes de partir travailler en Allemagne, nos effectifs en maquisards et légaux, des communistes surtout des J.C. car le pourcentage fixé par ces organisations ?????? dès juillet les non communistes étaient les plus nombreux et de beaucoup au mois d’août 1943 est devenu important. Ce qui oblige, pour sa sécurité et surtout tactique le camp Hoche à se diviser en quatre groupes, dont principalement :
- Un détachement, avec Edmond PETIT, rejoint le groupe de Besson-Bresnay, il est fort de 12 hommes. Edmond PETIT, dit Bébé Rose, deviendra corégional F.T.P. de l’Allier. Ce fut un combattant des plus valeureux
- Un détachement, avec Maurice RAYNAUD, dans la région de Bransat compte 15 hommes. Maurice est arrêté le 22 janvier, sera déporté à Buchenwald par le convoi n° 211, du 12 mai 1944. Il fera parti de la brigade libératrice de ce camp.
- Le détachement central, le plus important,17 hommes, rejoint la forêt des Colettes où Etienne PEIGUE a trouvé un emplacement, près de Boénat, pour établir le camp. Il bénéficie de l’aide de la gendarmerie de Bellenaves, plus que favorable à la Résistance et à laquelle est due une reconnaissance infinie (Chef BOUYET, le gendarme CAPILLON et ses collègues). Cette brigade, comme à Bourbon l’Archambault, mériterait un écrit particulier du fait de leur mépris pour l’anticommunisme et l’anti-F.T.P. si tenace encore…
R. F. :
Comment s’est effectué votre déplacement ?
G. G. :
Le déménagement du maquis vers la forêt des Colettes s’est fait à vélo. Bonhommes et vélos sont chargés au maximum et subissent de multiples crevaisons tant, à l’époque, les voies routières étaient dans un état lamentable et les pneus de même. Mais l’usage par véhicule était encore ignoré, c’est-à-dire pas possible alors qu’il se pratiquait en Puy de Dôme (camp Péri).
R. F. :
Êtes-vous resté longtemps dans la forêt des Colettes ?
G. G. :
Relativement peu, suite, vraisemblablement, à la dénonciation par l’aspirant TEILLIERE des chantiers de jeunesse (son père était un policier d’un certain rang à Vichy), le maquis est attaqué le 25 septembre 1943, au matin, par 120 gardes armés venus de Riom. Ils sont accompagnés d’une brigade spéciale, chargée de la répression contre la Résistance. Heureusement, tous les maquisards, à l’exception des 2 gardiens du camp, étaient en opération à Montluçon pour une double mission :
- premièrement, encadrer un rassemblement de la population, (enterrement dans le carré militaire du cimetière de l’Est de MOntluçon des aviateurs anglais, victimes de la « flag » lors du bombardement de Dunlop). Cette mission est annulée par le responsable régional LAURENT, dit Edmond : le détachement de renfort du camp « 14 Juillet » n’a pu être acheminé ainsi que l’équipe spéciale en mission.
- deuxièmement, attaquer le poste de D.C.A. allemand des Guineberts. L’attaque ne put avoir lieu : un détachement de l’armée allemande est en manœuvre de nuit, dans cette zone. Peut-être aurions-nous dû le faire ? (Mon adjoint et les responsables de groupes n’y étaient pas favorables ! Et pourtant il faut décider !)
Pendant notre déplacement à Montluçon, nous étions logés dans un hangar appartenant à Louis BAVAY qui lui servait, avant son arrestation, d’entrepôt pour son commerce, au lieu-dit le Pont Vert, route d’Argenty.
A notre retour, avec l’adjoint ESTORGUE, nous ne pouvons que constater la destruction du campement et nous replier. Heureusement, les forces de l’ordre sont reparties sans laisser de surveillance sur les lieux. Seuls les 2 gardiens, HUGUET et BONNET, ont été arrêtés, ainsi que BOUCULAT, un jeune de la région, qui se trouve dans le coin et n’appartient pas au maquis.
R. F. :
Dans les jours qui ont suivi, n’y a t-il pas eu d’autres arrestations ?
G. G. :
COURROUX Félix est arrêté le 26 septembre 1943, au matin, par les gendarmes de Gannat qui arrêteront, quelques heures plus tard, Tilou BAVAY, responsable régional F.T.P, près de la gare de Gannat et ensuite Jacques GUILLIEN.
R. F. :
Que sont-ils devenus ?
G. G. :
BOUCULAT, HUGUET, BONNET, COURROUX, GUILLIEN, BAVAY, après des interrogatoires musclés par la police française, sont internés à la prison de Clermont-Ferrand. BOUCULAT est relâché par manque de preuves, tandis que les cinq autres sont transférés à Riom. Ils sont jugés et condamnés à un an de prison courant décembre, par le tribunal de Riom. (G. G. aux travaux forcés par contumace).
Le 30 décembre, ils sont transférés à la centrale d’Eysses. Le 19 février, ils participent à la tentative d’évasion collective pour rejoindre le maquis et reprendre l’action. Cette tentative échoue. 14 détenus passent devant la Cour martiale. Le 23 février, 12 sont condamnés à mort. La sentence est rendue à 10 heures, ils sont fusillés à 11 heures. Le 30 mai, les 1 200 détenus de la centrale sont remis aux Allemands par le gouvernement PETAIN. Les Allemands les transfèrent, dans des conditions très dures, au camp de Royallieu, près de Compiègne. De là, ils sont déportés, le 18 juin 1944, au camp de concentration de Dachau où ils arrivent, le 20 juin 1944. Ils sont mis en quarantaine au block 17 avant d’être répartis dans des Kommandos de travail.
BAVAY, BONNET, HUGUET sont affectés au commando d’Haslach, GUILLIEN à celui de Blaichach, COURROUX est affecté au camp de Flossenburg où il décède.
R. F. :
Qu’avez-vous fait après avoir constaté que tout était détruit ?
G. G. :
Avec ESTORGUE, nous avons fait un premier constat, effectivement :
- Perte des vivres et du matériel de lutte amassés au prix de sacrifices immenses, mais notre lot de munitions ne fut pas découvert (récupéré par la suite).
- Prévenir ceux qui nous aident et notre Etat Major afin de prendre les décisions qui s’imposèrent.
Compte tenu des difficultés de la proximité de l’hivernage des maquisards, (l’insécurité que présentent, en hiver, les forêts de notre région = présence de bûcherons, des chantiers de jeunesse), il est décidé, avec l’Etat Major interrégional et régional, la dissolution du maquis et l’affectation hors Allier du maximum de personnels (craignant les repérages policier et même des indications, involontaires, des captifs).
Cette dissolution permit une restructuration afin d’être efficace et de libérer les F.T.P. légaux de la charge du maquis et de les engager dans d’autres actions de Résistance. Ce qui fut bénéfique pour 1944 lorsque l’on songe au développement des formations. (cf Historique de l’autorité militaire : 29 formations F.T.P. en 1944)
R. F. :
Il te reste encore d’autres tâches avant de penser au repos ?
G. G. :
Il faut, en premier, affecter les maquisards dans d’autres unités.
Puis assurer, ainsi qui avait été prévu, l’accompagnement de sécurité et le placement des évadés des prisons de Saint-Étienne et du Puy en Velay (un lot important pour l’Allier).
Ces missions terminées, nous nous sommes repliés sur le Cher où habite la sœur de ESTORGUE. Nous avons eu l’impression d’être suivis depuis Bellenaves par une traction. Nous allons la semer à la Racherie (route de Moulins Saint-Pourçain-sur-Sioule) en empruntant des voies secondaires.
Nous passons chez les DEPRESLES, à Meillard, chez les CHALMIN, les LACARIN à Cressanges, GUETONY à Marmignoles. Arrivés chez la sœur d’ESTORGUE, à Saint-Amand-Montrond, nous devons quitter précipitamment la maison, en passant par le jardin, car une traction-avant vient de s’arrêter devant la demeure. Deux policiers en descendent et pénètrent à l’intérieur (pour interroger la sœur d’ESTORGUE, nous saurons plus tard).
Nous nous séparons. Je continue sur Issoudun, où je vais me planquer chez Monsieur CHERAMY, chef de gare à Reuilly (Indre). Par la suite, je suis affecté, après l’enquête de circonstance, à la direction militaire des F.N.-F.T.P. à Clermont, à Saint-Étienne, puis à Lyon.
R. F. :
Comment fut relaté cet événement dans la presse ?
G. G. :
Le communiqué remis à la presse mérite attention. « Ils furent condamnés » comme « des individus détenteurs d’armes volées. » Les termes de ce communiqué ont dû être bien soupesé afin de ne pas dire « un maquis où des F.T.P. menaient la lutte armée. » En fait, une affaire banale.
R. F. :
Que sont devenus les maquisards ?
G. G. :
Le 29 septembre, les éléments rescapés du maquis HOCHE reçoivent une nouvelle affectation dans d’autres camps F.T.P. : Gabriel PERI dans le Puy de Dôme, WOLDI dans la Loire et la Haute Loire. Seule donc une équipe dite spéciale, chargée de la sécurité et de la protection de l’organisation, reste à Montluçon, et fera son chemin de formation maquisarde, au 6 juin 1944, des éléments donneront lieu à un complément d’effectifs :
- au camp (maquis) « 14 Juillet » du capitaine « Gaby » DAGOURET, qui est né aussi pour une part des mineurs résistants de Buxières-les-Mines
- la mise sur pied d’une compagnie de milices patriotiques qui prirent part à la libération de Montluçon.
30 SEPTEMBRE, REGROUPEMENT DES ELEMENTS RESCAPES ET REAFFECTATIONS APRES LA DISSOLUTION DU MAQUIS
PREMIER GROUPE STATIONNE PRES DE BOENAT
Nom et prénom | Pseudo | Appartenance Du —————- au | Observations |
COURTADON Henri | Pierre | 20/06/43 10/09/43 | Muté dans la Creuse au maquis de Paltin |
GAUME Henri | Riri | 18/06/43 18/09/43 | Envoyé pour soins, n’a jamais rejoint |
ROYER Antoine | Maton | 17/06/43 20/09/43 | Muté à Limoges le 30/09/43 |
BOURGEOIS Joseph | Jojo | 30/03/43 20/09/43 | Muté à Limoges le 30/09/43 |
CECLIER Marc Couturier | Filoche | 20/08/43 30/09/43 | Muté ———— |
FERNANDEZ | Pedro | 17/07/43 30/09/43 | Muté sur le département de l’Allier |
LESPILLETTE | Dédé | –/11/42 30/09/43 | Mis à disposition CTIR Limoges |
MARCHELIDON | Lulu | –/11/42 –/10/43 | Arrêté |
DEUXIEME GROUPE STATIONNE PRES DE VEAUCE
Nom et prénom | Pseudo | Appartenance Du —————- au | Observations |
ESTORGUE René | Bibi | 25/05/43 20/09/43 | Muté PDD – arrêté à Clermont Ferrand |
BARDON Jacques | Boris | 20/08/43 30/09/43 | Malade n’a pas rejoint, resté sur le Cher |
Venus de Saint Amand | Polonais Zizi & Zuzu | 18/08/43 20/08/43 | Déserteurs du camp |
CALAME André | Bicot | 05/11/42 17/08/43 | Remis à la disposition E.X. SUR |
CIVADE Edmond | ? 30/09/43 | S/les ordres du recruteur | |
BOURNET Paul | Popol | 27/03/43 12/09/43 | Chargé de mission – a disparu |
TROISIEME GROUPE STATIONNE PRES DE BRANSAT
Nom et prénom | Pseudo | Appartenance Du ————— au | Observations |
AMEURLAIN Louis | Jean Louis | 20/03/43 27/09/43 | Muté en Haute Loire, camp Woldi |
ANTOINE Georges | Antoine | 01/07/43 30/09/43 | Muté dans la Loire, Roanne |
GEORGES | Gendarme | 18/06/43 30/09/43 | Reste sur département Haute Loire |
GAILLARD Paul | Jouet | 12/07/43 30/09/43 | Reste sur département Haute Loire |
BERTHELOT Armand | Pinson | 29/06/43 30/09/43 | Reste sur département Haute Loire |
LIVERNAIS Jean Marie | Jean Marie | 20/03/43 30/09/43 | Devenu recruteur pour l’Allier |
DEPRESLE Lucien | Lucien | 20/03/43 30/09/43 | Passe au camp Henri BARBUSSE |
DEPRESLE Lucienne | Jeanine | 20/03/43 30/09/43 | Arrêtée début 1944 |
On notera que Simone DEPRESLES, fille de Lucienne, capturée et emprisonnée à la Mal Coiffée (prison militaire de l’occupant) n’a pas reçu le titre d’internée parce qu’il lui manquait quelques jours d’emprisonnement de temps légal !
CORPS-FRANC SOUS LA RESPONSABILITE DE LEGER
Nom et prénom | Pseudo | Appartenance Du ————— au | Observations |
CUSSINET André | –/11/43 30/09/44 | ||
COURE Jean | Jean | –/11/43 30/09/44 | |
FOUGIER Aimé | Mémé | –/11/43 30/09/44 | |
COLLIN Roger | Coco | –/11/43 30/09/44 | |
FAYOLLE Louis | P. Louis | –/12/42 30/09/44 | |
DUGUIET Alphonse | –/01/43 30/09/44 | ||
ROUX René | Paulus | 15/08/43 30/09/44 | |
DONJON Antonin | ? 30/09/44 | ||
RENANT L. | p Louis | –/11/42 30/09/44 | |
Le Mitron | –/12/43 30/09/44 | ||
BARTHONEYE Edmond | Mormon | ? 30/09/44 | |
DEPRESLE Jean | Jeannot | 20/05/43 30/09/44 | Affecté à Saint Etienne, en mai 1944 |
RENAUD François | Loiseau | 10/09/43 30/09/44 | Equipes Allier |
BIDET Jean | 20/05/43 30/09/44 | Passé au camp CASANOVA à sa formation |
R. F. :
Comment s’est manifestée la solidarité envers les camarades emprisonnés ?
G. G. :
On sait, même, si cela est dissimulé, que la IIIème République avait pris des dispositions pour enfermer les communistes, surtout dans les prisons et les camps d’internement. C’est le cas de Jean RIEU, arrêté le 20 mars 1940, condamné à 20 ans de travaux forcés par le tribunal militaire de Clermont-Ferrand et emprisonné longuement ; de la sorte l’Etat français n’avait qu’à mettre en application les mesures de répression décidées sous la troisième république.
En dehors de son combat contre l’occupant et la collaboration agissante, le camp Hoche participe à la libération de leurs camarades emprisonnés dans les prisons du Puy en Velay et de Saint-Étienne.
La prison du Puy était considérée, à juste raison, par son régime extrême, comme une prison d’où l’on ne s’évade pas.
Le gouvernement PETAIN l’avait choisie pour y enfermer, en premier lieu, les 27 députés communistes, avant leur déportation en mars 1941, au pénitencier de Maison Carrée à Alger. Il ajouta à eux d’autres victimes.
Le 18 décembre 1942, à la prison du Puy, arrivent soixante résistants condamnés aux travaux forcés, seize viennent de la prison de Nontron, les autres en majorité de celle de Lodève.
Organisée par le commandant F.T.P. RAVEL, dit OLLIER, responsable F.T.P. de la Loire, la première évasion de la prison du Puy eut lieu dans la nuit du 24 au 25 avril 1943. Les 26 évadés, escortés d’une dizaine de F.T.P., devaient être rassemblés à Saint Christophe d’Allier. Dix-sept, ainsi que quelques-uns de leurs libérateurs, dont OLLIER, victime d’une mauvaise chute et blessé à la hanche, sont repris. 1 500 policiers, miliciens et G.M.R. étaient mobilisés pour les retrouver.
André LECOURT, qui fait partie de cette première évasion, réussit à passer, avec 3 autres camarades, à travers l’encerclement, 2 mois après, consigne lui est donné de reprendre son activité résistante dans l’Allier. Il fut un des responsables très influents auprès de la jeunesse et un responsable de très grande qualité.
R. F. :
Quels enseignements peut-on tirer de cette première évasion ?
G. G. :
Tirant les leçons de cette évasion dont le bilan n’est pas aussi positif que souhaité, il est décidé que la prise en charge des évadés doit les porter loin de la prison. A cette fin, les F.T.P. doivent les escorter sur de longues distances.
Comme les prisons du Puy et de Saint-Étienne sont sur le territoire d’action de l’inter région A et R2, le camp Hoche est engagé et associé aux diverses opérations pour l’escorte et la mise en sécurité d’un certain nombre d’évadés des deux évasions. Celle de la prison de Saint-Étienne a lieu le 25 septembre 1943, la seconde évasion de la prison du Puy en Velay le 1er octobre 1943.
L’évasion de quatre-vingt détenus (eux qui sont les véritables 80 de l’honneur) de la prison de Saint-Étienne fut minutieusement préparée à l’intérieur des prisons et à l’extérieur par les différents échelons de la région et inter région.
La prise en charge des évadés à l’extérieur de la prison nécessite une préparation très minutieuse et d’autant plus difficile que le nombre des évadés est important et qu’ils doivent être mis en sécurité, puis conduits par étape et par groupe. La présence de plusieurs groupes d’escorteurs armés est nécessaire. Ces escorteurs doivent connaître les itinéraires, les lieux de réception et d’hébergement, chose d’autant moins compliquée en Allier que le militantisme bourbonnais est une grande tradition.
L’expérience et la générosité bourbonnaise ne sont plus à faire (guerre d’Espagne 1936-1938, la débâcle.) Cette générosité va continuer pendant l’occupation et se manifester à nouveau pour les évadés des prisons.
Malgré la destruction importante du camp, les maquisards vont remplir la mission qui était confiée : Escorter, par voies routières, des évadés des prisons de Saint-Etienne et du Puy en Velay: Robert MARCHADIER, membre du comité central (il fut chargé de la mise sur pied de la clandestinité de la fédération de l’Allier-Cher de la zone non occupée), Marcel LEMOINE, député de l’Indre, GUDICELLI député de Marseille et Jean RIEU et Jean BURLES, membres de la direction nationale de la J.C.
MARCHADIER est hébergé au château des Garennes, commune de Verneuil-en-Bourbonnais, LEMOINE, GUDICELLI le sont dans des fermes de la région de Meillard et du Theil (conduits et protégés par G. G.).
Pour Jean RIEU et Jean BURLES, ils sont dirigés sur des fermes dans la région d’Ygrande. Ils y arrivent par le car venant de Bourbon l’Archambault. Ils sont pris en charge par Robert FALLUT.
Jean BURLES est hébergé une ferme à Theneuille, à Buxières-les-Mines puis à Meillard, rejoint Toulouse, où il doit reprendre son action résistante. Coupé de l’organisation par des chutes, inconnu des responsables locaux, il doit être récupéré. La direction de la J.C. demande à Yolande LECOURT (Evelyne dans la résistance), qui le connaît depuis son séjour à Meillard, de se rendre à Toulouse pour le récupérer. Ce qu’elle fit avec succès. De Toulouse, il rejoindra Lyon où il reprendra sa place comme interrégional.
La venue de Jean RIEU à Ygrande n’était pas préparée. Quelques années plus tard, lors d’un entretien avec André LECOURT, celui-ci dit qu’il s’était fait disputer pour l’hébergement de Jean RIEU. Celui-ci ne devait pas venir dans l’Allier, par mesure de sécurité car ils se connaissaient bien, avaient milité tous les deux en Gironde et avaient été condamnés, dans une même affaire de Résistance, en 1940.
Il n’aurait pas dû rester chez l’auteur, responsable des jeunes pour la région d’Ygrande, mais il n’est pas resté plus de 2 mois, considéré par ceux qui viennent à la ferme comme un parent réfractaire au S.T.O. Il ira terminer sa convalescence chez CHALMIN, à Cressanges. Il reprendra le combat dans un maquis de la région lyonnaise. Il sera de nouveau arrêté, sur dénonciation, sous le nom de Georges DUBOIS. Interné à la prison Saint Paul à Lyon, il sera déporté à Dachau puis à Buchenwald. Rentré en France, il sera élu député. [4]
Pour les escorteurs, ce sont de grosses responsabilités (très grosses) et des sueurs froides, même en se croyant un franc-tireur aguerri. Mais quelle joie intense en ayant réussi, ce qui explique que Robert MARCHADIER et Marcel LEMOINE sont venue spécialement en 1954 (dix ans écoulés et pourtant qui semblait la veille) pour me remercier ainsi que les anciens F.T.P. de l’escorte de sécurité de 1943. PACOT, dit Sylvain en a fait de même pour le P.C.
R. F. :
L’expérience acquise par ce premier maquis a-t-elle servi la résistance ?
G. G. :
Partant de résistants « ordinaires », en progressant dans l’action, les Francs Tireurs légaux deviennent, avec l’expérience acquise, des maquisards expérimentés qui préparent l’année 1944. Ils atteignent le stade armé que n’auraient pu atteindre ceux qui suivaient les conseils de KOENIG : attendre le jour J. pour agir alors que le général JOINVILLE (MALLERET) avait un autre conseil.
C’est pour laisser le mérite de la libération de l’Allier aux formations militaires, dites nobles, que la vie de ce premier maquis est passée sous silence par certains écrivains inattendus, ainsi que par des historiens, pas moins inattendus.
R. F. :
Les maquis qui se multiplient en 1944 ne bénéficient-ils pas de l’expérience acquise par ceux de 1943 ?
G. G. :
La plupart des résistants sont longtemps restés discrets sur ce que fut leur vie dans ces années 1940-1945. Cela a permis à certains écrivains de s’éloigner de la réalité.
Or, l’action est contagieuse. Elle entraîne le développement quantitatif des détachements mis sur pied et la participation, de plus en plus importante, de la population. Après la défaite des Allemands à Stalingrad, l’ambiance générale est favorable à la Résistance et à ceux qui luttent, les armes à la main. Même pour l’intérieur de nos organisations, cette valeur d’exemple fut utile.
Avec la participation accrue de la population à la vie du camp, utilisée en 1942-1943, il a été possible de tisser un maillage de cette population et d’atteindre 1944 où l’imbrication F.T.P. légaux et maquis a embrasé la population entière dans l’Allier, comme dans toute la France.
Les problèmes auxquels les maquisards ont dû faire face étaient considérables. La vie menée par les maquisards du camp Hoche, dont on ne parle pas ou si peu, est bien différente de celle menée par les maquisards d’août 1944, plus ou moins acceptés mais avec une ambiance toute autre. Oublier ce qui se fit avant 1944 et le démarrage de la Résistance 1939-1940, fait que la Résistance est faussée et amputée de faits essentiels (une manière de la malmener).
Pour moi, partant de mon expérience acquise avec le maquis Hoche, je suis devenu régional puis inter régional à Saint-Étienne, puis à Lyon, où je fus affecté après la capture de l’État-major F.F.I. de zone sud. Je fus spécialisé dans le domaine du Combat Armé puis chargé des problèmes militaires, un sort bien nouveau.
Pour ESTORGUE, affecté à la direction régionale du Puy de Dôme, il fut arrêté et interné à la prison du 92ème RI. Celle-ci est évacuée le 20 août 1944 par le convoi n° 275 sur le camp de concentration du Struthof où il arrivera le 30 août. Devant l’avance des troupes alliées en France, les Allemands évacuent ce camp le 4 septembre sur celui de Dachau. Après quelques jours au camp, il est affecté au Kommando de travail d’Haslach. Affaibli, il est transféré au Kommando de Vaihingen où il décède le 25 mars 1945. je dois dire qu’il fut un adjoint excellent et que nous avons beaucoup opéré ensemble.
R. F. :
Hoche et les communistes de la région ont joué un rôle déterminant dans la montée de la résistance et la libération du département ?
G. G. :
Oui, dès l’origine de la résistance dans l’Allier les communistes y furent pour une part importante, ce qui n’enlève rien aux autres.
Ils furent à l’origine de la Résistance armée, sans laquelle le département n’aurait pu se libérer par lui-même, en 1944. Cette évolution de la Résistance était le stade nécessaire pour atteindre la libération. HOCHE y fut pour quelque chose en donnant la marche à suivre comme les mineurs de Buxières-les-Mines surent donner la voie de ce qu’il fallait faire collectivement.
Pour être plus complet, après ce brossage sommaire des débuts la Résistance dans la région montluçonnaise, nous pouvons dire que Hoche en fut une partie animatrice importante de l’action armée par une voie inhabituelle et c’est probablement ce qui manquait aux autres, ce qui explique que le commandant ROGER (COURTEAU), C.F.L. des M.U.R. ait pu écrire au général commandant la région, immédiatement à la libération, que les F.T.P. étaient inexistants et n’avaient pas fait grand-chose. C’est probablement ce que pensait le général LEVY comme aussi le déclarant COLLIOU qui expurgea les F.T.P. de ses unités avec assurément une préférence parquée pour la garde de PETAIN, ce dont il n’a jamais voulu beaucoup parler et qui, en fait, constituait et remplaçait les maquisards des bois noirs soit disant accourus en très grand nombre à lui…
R. F. :
Pourquoi parle-t-on si peu de ce premier maquis et de la Résistance civile ?
G. G. :
Le général LEVY (histoire de résistance d’Auvergne) n’en parle pas, on le sait,
L’historien Eugène MARTRES (L’Auvergne dans la tourmente, 1939-1945) n’en parle pas lui non plus et c’est d’autant plus dommage qu’il est un grand et sérieux historien,
Georges ROUGERON n’en a donné qu’un aperçu en en faussant les noms des responsables.
Il est ignoré des historiens et écrivains montluçonnais. Des Montluçonnais sont pourtant à la création de ce maquis (et l’on fait de l’histoire montluçonnaise !).
Il aura fallu attendre les travaux d’André SEREZAT pour qu’il soit évoqué.
On peut se demander, 60 ans après, s’il n’a pas été considéré comme un mauvais exemple de Résistance bourbonnaise qu’il faudrait taire ?
R. F. :
Ceci dit, il a été tiré des enseignements de cette expérience, partagée également par le maquis de Châtel Montagne, auquel pourtant un grand nombre se rattachent de plus en plus maintenant ?